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Obligation de récupération et de valorisation de la chaleur fatale des data centers

Récupération de la chaleur fatale des data centers, d'une logique incitative à une approche plus réglementée

29 septembre 2023

La consommation croissante d’électricité du secteur du numérique, qui représente en France 2,5% des émissions de CO2 selon une étude de l’ARCEP et de l’ADEME, a incité les pouvoirs publics à bâtir un cadre propice à l’émergence d’équipements plus performants.

La loi visant à réduire l’empreinte environnementale du numérique, votée en 2021, a renforcé les exigences d’efficacité énergétique relatives aux data centers.

Le volet énergie de cette règlementation s’appuie sur la récupération de la chaleur fatale émise par les data centers et la mise en place d’indicateurs de suivi.

Objectif : promouvoir via la fiscalité des data centers et des réseaux moins énergivores

La loi met en place des contreparties au renforcement de l’éco-conditionnalité du tarif réduit de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) pour les data centers.

L’obtention du tarif réduit – 12€/MWh - de TICFE, pour les consommations supérieures à 1 GWh/an, est conditionnée à plusieurs critères énergétiques depuis 2022 :

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Un système de management de l'énergie certifié ISO 50001.

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L'entreprise exploitant le centre de stockage des données adhère à un programme, reconnu par une autorité publique, nationale ou internationale, de mutualisation des bonnes pratiques de gestion énergétique des centres de données incluant :

  • L'écoconception des centres de stockage de données ;
  • L'optimisation de l'efficacité énergétique ;
  • Le suivi de la consommation énergétique et la réalisation de comptes rendus
    périodiques y afférents ;
  • La mise en œuvre de technologies de refroidissement répondant à des critères
    de performance.
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Le centre de stockage de données numériques valorise la chaleur fatale émise par ses équipements, notamment à travers un réseau de chaleur ou de froid, ou respecte un indicateur chiffré déterminé par décret (en attente de publication) sur un horizon pluriannuel en matière d’efficacité dans l’utilisation de la puissance.

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Le niveau d'électro-intensité, apprécié à l'échelle du data center, est au moins égal à 2,25 %[1]. L’indice d’électro-intensité est calculé comme le rapport entre les coûts en électricité de l’entreprise et sa valeur ajoutée brute.

[1] Tel que prévu par les art. L. 312-64 et L. 312-70 du code des impositions sur les biens et services

Vers des objectifs contraignants sous l’effet de la directive efficacité énergétique

Texte phare du paquet climat « Fit for 55 », la directive révisée relative à l’efficacité énergétique a été définitivement adoptée par le Conseil de l’Union européenne le 25 juillet 2023 et publiée au Journal officiel de l'Union européenne le 20 septembre 2023.

Selon les estimations, la consommation électrique des data centers devrait représenter plus de 3% de la demande d’électricité de l’Union européenne à horizon 2030. Pour freiner la progression de leur consommation, le texte introduit des exigences nouvelles :

  • Les data centers d’une puissance totale nominale supérieure à 1 MW seront dans l’obligation d’utiliser la chaleur fatale, sauf impossibilité technique ou économique. Une analyse coûts/avantages devra désormais être réalisée pour tout projet de nouvelle installation ou de rénovation substantielle. Les data centers devront se mettre en conformité avec ces obligations avant le 11 octobre 2025.
  • A compter du 15 mai 2024, les data centers d’une puissance supérieure à 500 kW devront mettre annuellement à disposition du public des informations relatives à leur performance énergétique (superficie au sol du data center, consommation d’énergie, puissance installée, utilisation de chaleur fatale…). L’ensemble de ces données sera compilé dans une base de données par la Commission européenne, qui sera tenue de présenter d’ici le 15 mai 2025 un rapport au Parlement européen et au Conseil relatif à l’établissement de normes minimales de performance, le cas échéant traduit sous forme de propositions législatives.

La récupération et valorisation de chaleur fatale dans le secteur tertiaire

Il s’agit de la chaleur provenant d’un équipement mais qui n’en constitue pas la finalité première, raison pour laquelle elle est non récupérée.

La valorisation de la chaleur fatale est largement pratiquée dans le secteur industriel, mais on oublie trop souvent les sites tertiaires où les data centers présentent de gros gisements de chaleur fatale, du fait des nombreux serveurs informatiques les constituant.

Les data centers sont en constante évolution face à l’augmentation du volume des données numériques. Les centres informatiques d’hébergements des données représentent 30% de la consommation d’électricité du numérique.

Ces sites sont équipés de groupes de production de froid pour refroidir les serveurs qui évacuent dans l’air la chaleur fatale. Ce refroidissement représente de 30 à 60% de leur consommation globale d’électricité.

Quelle valorisation est possible et comment trouver les gisements ?

La récupération de chaleur fatale liée aux data centers est utilisée pour le chauffage des locaux, ou production d’électricité, ce qui limite les émissions de gaz à effet de serre. Elle peut également être canalisée pour être réinjectée dans un réseau de chaleur à proximité géographique et ainsi chauffer d’autres bâtiments dans la même zone.

Schema sur la récupération de chaleur fatale en rénovation datacenter

Exemple de récupération de chaleur via le réseau aéro-refroidissement des groupes froids, en rénovation

Pour cela, il est nécessaire de vérifier la bonne performance des installations de chauffage (Gestion Technique de Bâtiment, campagne de vérification des émetteurs, etc.) avant d’envisager un raccordement à une récupération de chaleur, à un niveau de température raisonnable.

Dès que le besoin est correctement dimensionné, celui-ci peut être mis en adéquation avec la source de chaleur :

  • En puisant les calories sur le réseau technique « aéro-refroidisseur », chargé d’évacuer les calories du groupe froid via des aéro-refroidisseur en extérieur.
  • En échangeant directement avec le condenseur du groupe froid (fluide frigorifique), à un ou plusieurs étages de compression, en récupération totale (toute l’enthalpie de vaporisation est valorisée).
  • En échangeant la chaleur au niveau du désurchauffeur du groupe froid (une partie du condenseur) : la puissance récupérée est plus réduite, mais le niveau de température est plus élevé, et donc plus facilement exploitable (récupération partielle). Ceci est adapté lorsque les niveaux de températures sont élevés et lorsque la puissance frigorifique est largement supérieure au besoin de puissance thermique.
  • La récupération de chaleur directement sur le retour du réseau d’eau glacée est également une application émergente, à plus faible température, car les équipements informatiques résistent à des températures plus élevées, et donc des régimes de température de moins en moins contraignants.

 

L'hôtel JW MARRIOTT de Cannes valorise la chaleur fatale sur son groupe froid

JW MARRIOTT-Cannes

termination de l’indicateur de suivi des consommations énergétiques des data centers

Un décret d’application va décrire l’indicateur de suivi de la consommation énergétique des data centers. Cet indicateur n’est pas encore défini à ce jour, mais il existe déjà 2 indicateurs connus par les data centers : le DCEM français et le PUE élaboré en Amérique du Nord.

En France, l'indicateur énergétique DCEM (Data Center Energy Management) a été conçu par le Club des Responsables d'Infrastructure et de Production pour remplacer l'indicateur traditionnel PUE (Power Usage Effectivness).

Le DCEM valorise la récupération de chaleur dans les data centers, a contrario du PUE qui dégrade les valeurs des indicateurs en ignorant les services énergétiques apportés par le data center en dehors de son strict périmètre informatique. Il s’agit de mesurer l’énergie qui entre dans le process, mais aussi la part d’énergie réutilisée pour d’autres usages, afin de déterminer ce que l’on peut faire pour améliorer l’efficacité énergétique d’un data center.

L’échelle est différente pour les data centers construits avant et après 2005 (protocole de Kyoto), afin d’encourager les data centers les plus anciens qui fournissent des efforts pour améliorer leur bilan énergétique. L’indicateur prend également en compte le volume des infrastructures, avec un indicateur de gabarit permettant de classer les salles en fonction de leur taille.

Cet indicateur est aujourd’hui encore peu utilisé, mais de plus en plus d’utilisateurs de data centers en sont satisfaits. Une certification serait bientôt attendue.

En attendant les précisions du décret, il existe des préconisations que l’on peut retrouver dans le guide des bonnes pratiques de l’Union Européenne ou 2019 Best Practice Guidelines for the UE Code of Conduct on Data Centre Energy Efficiency.

Valoriser la chaleur fatale de vos data centers, une opportunité à ne pas manquer !

La valorisation de la chaleur fatale est une opportunité pour réduire efficacement les coûts énergétiques. Déjà exploitée dans le secteur de l’industrie, et notamment sur les groupes de production de froid bénéficie de subventions pour sa mise en place, via le dispositif des Certificats d’Économies d’Énergie (CEE).

Les conditions d'éligibilité pour le secteur tertiaire s’appliqueront en lien avec la fiche d’opérations standardisée : BAT-TH-139.

Parole d'expert

Pourquoi récupérer la chaleur sur vos groupes froids ?

Vous souhaitez en savoir plus sur les technologies de récupération de chaleur fatale, ou étudier leur faisabilité technique dans votre data center, et connaître les conditions pour bénéficier d’une subvention ?

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